Réalisé par Cédric Klapisch
Avec Karin Viard, Gilles Lellouche, Audrey Lamy
Français – Comédie dramatique
1h49min – produit en 2011
C’est au sens propre, la tranche du gâteau d’anniversaire au goût amer.
Ce jour là, Audrey (Karin Viard), la maman est hospitalisée à la suite d’une tentative de suicide en réaction à son licenciement. Un découragement vite surmonté. Audrey est une battante qui quitte Dunkerque pour Paris, tournant le dos au mirage de la résistance syndicale dans l’entreprise, vérification faite du manque d’empathie de son ex, mais la solidarité familiale établie, avec le frère qui gardera les enfants. Elle trouve là- bas un emploi de femme de ménage.
Au sens figuré, c’est la part du profit réalisé par Steve (Gille Lelouche) trader à la Cité de Londres, muté à Paris pour diriger un fonds spéculatif. Pur produit du système bancaire, c’est un prédateur dans la spéculation et en amour, qui conquiert au pas de charge. Or, ces deux trajectoires individuelles, celle de l’ouvrière et du golden boy , exacts opposés sur l’échelle sociale vont bien sûr se rencontrer dans l’appartement de Steve. Quand Steve, obsédé par le seul ballet des taux de change sur l’écran d’ordinateur et les courbes des marchés financiers, reçoit la garde d’un jeune fils oublié, sa femme de ménage pourvoit aux carences paternelles manifestes et assure avec l’aptitude d’une mère accoutumée, la prise en charge de l’enfant. Alors un rapprochement s’opère entre les protagonistes, Steve n’offrant à une Audrey un instant énamourée, que les seuls attributs de sa puissance, le carnet de chèque et la couette.
Mais Cédric Klapisch n’est pas dupe de la réalité sociale et le scénario du conte de fée s’interrompt aussi brutalement qu’un licenciement. Et d’imaginer même une confrontation entre le pilote de la ferrari qui a provoqué la faillite et les grévistes de l’usine délocalisée. Au final, c’est la douche froide, menottée au fond d’un fourgon de CRS, l’ouvrière finira sa course vengeresse. (La Ville de Calais du film « welcomme » est toute proche!)
Si on est très loin avec « ma part du gâteau » d’un film militant ou d’un pamphlet antilibéral, on appréciera qu’un film grand public ait su croiser pour en souligner les qualités et les défauts deux comportements sociaux à l’origine de la lutte des classes, issus du capital et du travail, sans manichéisme aucun. On appréciera aussi la virtuosité de la caméra complice des rigodons au premier rang des acharnés du carnaval, s’éloignant tel un goéland dans le ciel de la plage de Malo-les-bains, fixant les canards du plan d’eau du Courghain, ou égrenant les conteneurs en rade sur les docks. Comme un verre de marc à la brume, consolant et régénérateur, « ma part du gâteau » peut contribuer à réveiller, sous le masque de la comédie, quelques consciences éteintes.