Furieuse de la vente d’un cheval qu’elle se réservait, Gracieuse (Marina Hands) démissionne avec éclat du centre équestre qui l’employait, retourne chez son père, paysan à la retraite et se fait recruter comme palefrenière dans le haras proche, tenu avec autorité par Joséphine de Silène (Josiane Balasko) qui veut conclure par son intermédiaire une transaction sur les prairies voisines, convoitées pour l’agrandissement du domaine.
Farouche, indomptable, solitaire, Gracieuse n’a d’empathie que pour les chevaux qu’elle monte et d’ ambition que pour la compétition. Elle ne se domine pleinement qu’en domptant sa monture qu’elle entraîne au dressage, travaille les postures, en l’absence des propriétaires, trop moyen, galop à gauche, appuyer à gauche, changement de pied, appuyer à droite, diagonale, piste à droite, pirouette…, répétant mentalement les reprises jusqu’à l’obsession. Contractée en éconduisant un soupirant, une profonde blessure au front et à la pommette ne la dissuade pas de poursuivre son rêve, un bandeau protègera la plaie dans la tradition du pirate, fière et rebelle.
Elle a trouvé son mentor, Franz Mann (Bruno Ganz) ancien champion olympique de dressage, entraineur de prestige au haras et concubin de Joséphine. Mais à l’instar de Frankie Dunn, le coach blasé de Million Dollar Baby, l’art équestre a t-il encore un sens pour ce champion usé, voué aux cavalières fortunées, ses élèves, dont il paraît palper le galbe du rein ou de la cuisse plus en satyre qu’en esthète du mouvement? Au tournant de sa vie, le maître parviendra t-il à se cabrer pour échapper à son destin d’assujetti et se réhabiliter à ses propres yeux?
Patricia Mazuy dresse avec énergie le portrait croisé de deux cavaliers l’une égarée, l’autre enlisé dans un milieu trop mercantile destinés à se rejoindre sur l’aptitude à transmettre et à recevoir, condition de l’excellence. A la naissance de tout champion, il faut cet attelage particulier, cette alchimie du maître et de l’élève.